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J'ai demandé à Alain Lavanne, responsable pédagogique du diplôme Documentaliste Multimédi@s à INAsup, ce qu'il pensait de l'impact de l'automatisation sur le métier auquel il forme.
Voici sa réponse :
Impact imminent
Comme la mécanisation a longtemps bouleversé l’artisanat et l’industrie, l’automatisation bouscule les activités du tertiaire. Ainsi, l’apparition de solutions complexes d’analyse-indexation automatique ne manque pas d’interroger les métiers de la documentation, notamment appliquée à des fonds multimédias.
S’agissant notamment de documents audiovisuels, les enjeux techniques sont particulièrement complexes et nombreux : retranscription des textes parlés en textes écrits (speech to text), reconnaissance des visages, des locuteurs, des logos et des caractères, reconnaissance des structures formelles (alternance de plateaux et de reportages dans un journal télévisé, par exemple)… Une fois ces différents niveaux d’analyse réalisés, reste à générer automatiquement l’indexation.
On comprend aisément que ce type d’outils peut représenter une menace en termes d’emploi et de légitimité pour les documentalistes, tout comme le développement d’internet a largement fait perdre aux professionnels de la documentation le magistère exclusif de la recherche documentaire et de la communication aux usagers.
Alors, l’analyse et l’indexation automatiques seront-elles un cataclysme majeur pour les documentalistes ? Pas fatalement, à condition que le métier sache se repositionner vers les savoir-faire à forte plus-value comme la valorisation et l’éditorialisation, l’élaboration et l’alimentation des référentiels documentaires, le contrôle qualité…
Cela dit, toutes les structures qui comprennent en leur sein une activité de documentation ne vont pas se doter du jour au lendemain de solutions d’analyse-indexation automatisées, avant tout pour des questions de coût. Pendant plusieurs années (impossible de prédire combien !), nous aurons donc des réalités professionnelles très différentes et se pose dès aujourd’hui la question de la posture pédagogique à adopter.
Une pédagogie repositionnée
Faut-il basculer les programmes de formation initiale et les offres de formation continue vers un modèle minimisant l’apprentissage de l’analyse-indexation ? Une telle option apparaît outrancière et dangereuse car elle ne permettrait plus de répondre aux besoins des structures qui n’auraient pas encore basculé vers l’analyse-indexation automatique. De surcroît, un tel apprentissage ancre l’importance des normes documentaires, de l’usage d’un langage contrôlé et des référentiels ad hoc. Il oblige le regard des apprenti.es documentalistes sur les objets analysés à changer : il faut devenir analyste et non plus lecteur, spectateur ou auditeur ; il faut produire une description normée et non un avis personnel.
Trois conclusions donc :
- le métier de documentaliste (notamment audiovisuel et multimédias) n’est pas prêt de disparaître, à condition de s’adapter ;
- la pratique de l’analyse-indexation par des documentalistes va sûrement diminuer mais pas disparaître
- l’apprentissage des compétences liées à l’analyse-indexation demeure essentiel à une bonne pratique.
Alain Lavanne, responsable pédagogique InaSUP